Couverture du Précis de CHIRURGIE INFANTILE
L’INTERVENTION CHIRURGICALE CHEZ LES ENFANTS
L’intervention chirurgicale, chez les enfants, consiste tantôt en une opération sanglante, tantôt en manoeuvres destinées à obtenir la correction d’une déformation acquise ou d’une malformation congénitale.
Dans les deux cas, il est presque toujours nécessaire d’avoir recours à l’anesthésie.
ANESTHESIE
En règle générale, il ne faut point opérer un enfant sans l’avoir anesthésié.
Nous devons en effet d’abord éviter à l’enfant la douleur ; mais il nous faut aussi abolir ses réflexes de défense s’il s’agit d’un nourrisson. Bien plus, si chez un très jeune enfant, non encore conscient, la douleur n’est pas perçue comme telle, il n’est point prouvé néanmoins qu’elle ne puisse déterminer des réflexes généraux redoutables.
Cette règle d’ailleurs souffrira des exceptions en particulier, il est inutile et probablement désavantageux de recourir à l’anesthésie pour opérer les nouveau-nés dans les deux ou trois premiers jours de leur vie, surtout s’il s’agit d’intervention rapides. C’est un point sur lequel nous reviendrons.
Elle n’a, chez les enfants, que de rares indications. Elle sera quelquefois avantageuse, pour exécuter un empyème par exemple, ou une circoncision.
Nous utilisons alors la solution de novocaïne à 1/200 et méme 1/300, sans adrénaline.
Dans la majorité des cas, il ne faut point compter sur l’anesthésie locale, en Chirurgie infantile. L’enfant est trop impressionnable et trop pusillanime pour ne point s’affoler au cours de l’acte opératoire. Méme s’il n’éprouve point de douleur, la sensation (le contact qui persiste après anesthésie locale, quand agit l’instrument de chirurgie, suffit à provoquer des cris et des mouvements désordonnés impossibles à refréner complètement, et qui constituent une géne sérieuse à la correcte exécution de l’acte opératoire. Pour la méme raison, nous n’employons ni l’anesthésie régionale, ni la rachianesthésie.
Ethérisation.
Sauf cas exceptionnels que nous allons préciser plus loin, nous endormons les enfants à l’éther, quels que soient leur âge et leur lésion. Ce n’est point ici le lieu d’étudier l’anesthésie générale par l’éther. Nous dirons seulement en quoi la narcose diffère chez l’enfant et chez l’adulte.
Nous nous servons de l’appareil d’Ombrédanne, toujours chargé à 150 gr.
Il faut avoir un jeu de masques appropriés à la taille de la face des sujets. Colin en a fabriqué trois modèles, petit, moyen et grand, que nous choisissons suivant les cas (fig. I).
Pour obtenir la résolution, on doit donner proportionnellement beaucoup plus d’éther à un enfant qu’à un adulte.
Il faut conduire le début de l’anesthésie beaucoup plus vite, que chez l’adulte. L’enfant, affolé par le contact du masque, se débat, déplace l’appareil, aspire çà et là de l’air supplémentaire et l’anesthésie s’établit mal. Il faut, au bout de quelques secondes, atteindre le chiffre 6. Bien souvent méme, on est obligé d’y recourir d’emblée. La perte de connaissance survient après quelques inspirations. Aussitôt il faut baisser et chercher le chiffre de régime correspondant au seuil de l’anesthésie, cette ration d’entretien étant 1/2,1 ou 1. 1/2 de la graduation de l’appareil, suivant l’âge de l’enfant.
Chloroformisation.
L’appareil à éther n’est pas utilisable dans les opérations sur la face, la bouche, le pharynx, parce qu’il masque le champ opératoire. Dans ce cas, nous faisons endormir l’entant à l’éther. Puis, quand la résolution est obtenue nous continuons la narcose par insufflation de chloroforme. Nous n’avons pas pu arriver, sans masquer la face, à entretenir convenablement l’anesthésie par insufflation de vapeurs d’éther, chauffées ou non, comme on prétend le faire en Angleterre : ce que nousavons vu à Londres a du reste confirmé nos présomptions à ce sujet.
Le dispositif dont nous nous servons (fig. 2) est constitué par le flacon à essence du thermocautère dans lequel on met 30 grammes de chloroforme.
Le flacon est monté avec sa soufflerie d’un cote, et de l’autre, est mis en connexion avec un tuyau de caoutchouc relié lui-méme par un court tube de verre à une sonde de Nélaton, de diamètre tel qu’elle traverse à frottement doux la narine de l’opéré. Cette sonde a été passée dans le maillon attenant à un anneau brisé de bijoutier, du type de ceux qu’on emploie pour fixer les chaînes de montre (fig. 3).
La sonde est engagée par une narine, puis conduite dans le pharynx sous le contrôle de la vue. Pour cela, il faut mettre un ouvre-bouche et regarder. L’oeil de la sonde doit apparaître derrière le voile, traverser le pharynx et disparaître derrière la base de la langue c’est à ce moment précis qu’il faut arréter sa pénétration. On fait alors coulisser l’anneau brisé jusqu’à la narine et on l’agrafe sur l’aile du nez. La sonde ne peut plus, dès lors, se déplacer au cours de la narcose.
Lorsque la sonde est mal placée et trop profondément engagée, les vapeurs pénètrent dans l’oesophage, distendent l’estomac, mais l’enfant ne dort pas. Lorsqu’elle ne descend point assez bas, le mélange insufflé barbote dans la salive, remplit la bouche d’écume, et l’anesthésie ne s’établit pas régulièrement.
La quantité de vapeurs à insuffler se règle comme dans toute anesthésie au chloroforme.