DES MOTS ET LEUR SENS
Humanisme
Doctrine philosophique qui met l’homme depuis un siècle au centre de ses conceptions.En médecine, c’est voir l’homme qui est derrière la maladie et le respecter ; c’est aussi affirmer le lien qu’elle a toujours eu avec la philosophie et participer aux nouveaux combats de la bioéthique.
Déontologie
du grec deontos : ce qui convient, devoir et logos : discours (Boiste, 1839).Ensemble des règles qui régissent une activité.Selon Marcel Cohen, se plier à des règles, c’est acquérir une liberté et en méme temps une possibilité d’action bien dirigée.
HIPPOCRATE ET LES SIENS
Dans les Epidémiques, le médecin soigne des hommes et des femmes, des riches et des pauvres, des citoyens et des étrangers en visite, des hommes libres et des esclaves.Dans les Préceptes, le médecin se fait payer selon les moyens de son malade et doit étre disposé à le soigner gratuitement. Lors de la victoire d’Athènes sur Sparte à la bataille navale des Arginuses (406 av. JC), les généraux vainqueurs furent exécutés pour n’avoir pas recueilli les morts et les blessés.
LE SERMENT D’HIPPOCRATE

Il énonce les règles de la profession médicale.Il fut d’abord prononcé dans les Collèges d’Asclépiades, d’où ses connotations religieuses : « Par Apollon, par Esculape , par Hygie et Panacée ... » Selon Emile Littré, un serment est une promesse qui est faite en prenant Dieu à témoin ou ce que l’on considère comme sacré. Sa rédaction est marquée par son époque, mais il défend des positions morales intemporelles. L’article 8 traite du secret médical. Il était absolu dans le souci d’étre utile et de ne pas nuire au patient. Il reste encore aujourd’hui au coeur de la démarche médicale, méme s’il comporte maintenant 32 dérogations légales. Le corps central du Serment comporte une simple phrase qui est
LA MEDECINE JUIVE ET ARABE
Les musulmans du Moyen Age n’ont laissé aucun texte sur les devoirs des médecins. Quelques juifs de langue arabe s’inscrivent dans le sillage d’Hippocrate . Assaph le Juif (VIe ou VIIes) rédige un serment dont les injonctions sont voisines du texte grec.
MAIMONIDE

Né à Cordoue en 1135, il meurt au Caire en 1204. Il appartient plus à la philosophie qu’à la médecine. Il avait 13 ans quand il eut le choix entre la conversion à l’Islam et la mort. Il serait resté musulman jusqu’à l’à ¢ge de 30 ans. En médecine, il a gagné la célébrité grà ¢ce à « la prière d’un médecin ».Ce texte, dont l’authenticité est contestée, reprend des thèmes hippocratiques : « Mets dans mon coeur l’amour de la science et de tes créatures ; affermis mon à ¢me, afin que je voie dans le malade l’homme seul ; fortifie-moi afin que je ne m’écarte pas de la voie de la vérité sans rougir ; éloigne de moi - à ” Dieu - l’idée que je peux tout… »
RENAISSANCE DU SERMENT
Le serment sera oublié jusqu’au XIXe siècle. A Montpellier, en 1804, le Doyen F. Lallemand fit préter serment à ses nouveaux docteurs.
Le texte est éloigné de l’original mais en traduit l’esprit : respect des maà ®tres, obligations envers leurs fils, respect du secret médical, non-corruption des moeurs. Peu de facultés de l’époque imitèrent celle de Montpellier.
La prestation du serment s’est généralisée depuis 1945.
L’OMS, en 1948, a tenté sans succès de proposer le serment de Genève qui puisse étre prononcé dans tous les pays.
Là où un serment est prononcé, quelle qu’en soit la rédaction, on peut penser qu’il existe l’ébauche d’un souci éthique.
LA CONSCIENCE HUMANITAIRE
Le serment d’Hippocrate n’est pas la seule origine de l’éthique médicale contemporaine. Au XIIe s., le sultan Saladin offrit la neutralité aux blessés de l’Ordre de Saint Jean de Jérusalem. Au XVIe s., Ambroise Paré fit en sorte « que jamais on ne laisse un blessé sans aide ».
L’infirmière anglaise Florence Nightingale porta secours à des centaines de blessés, alliés ou ennemis, pendant la guerre de Crimée (1855).

C’est avec Henri Dunant , le père de la Croix-Rouge que l’humanisme occasionnel prit une dimension éthique internationale. Témoin de la bataille de Solferino (1859), il relata la brutalité des combats et fonda en 1863 le Comité des secoureurs volontaires.
LA MEDECINE DEVOYEE
Les Dogmatiques défendaient la vivisection à Alexandrie (IIIes. av. JC). « Ce n’est pas une cruauté que chercher des remèdes pour des multitudes en ne sacrifiant qu’un petit nombre de criminels ». A Jaffa en 1799, Napoléon, visitant les pestiférés, subjugué par l’émotion, ordonna à Desgenettes de les empoisonner. Il s’y refusa en déclarant : « mon devoir n’est point de tuer, mais de conserver ».
En 1885, Louis Pasteur demanda à l’empereur du Brésil de permettre aux condamnés à mort de choisir entre la mort imminente et une expérience de vaccination contre la rage. Charles Nicolle, un de ses plus proches élèves, dira de cette position éthiquement indéfendable :
HITLER affirmait dans Mein Kampf (1923) : « Une génération plus forte éliminera les faibles ». En 1935, Karl BRANDT, né à Mulhouse en 1904, milite en faveur de l’élimination par la faim des enfants incurables. Viktor BRACK fait tuer 275 000 malades des hôpitaux et des asiles et méme des anciens combattants de la guerre de 1914-1918.
LES CODES DE DEONTOLOGIE

En France, dès 1935, les syndicats médicaux travaillent à la rédaction de règles professionnelles. Le Conseil de l’ordre des médecins naît en 1940. Louis Portes en est le premier président et aura bien des difficultés avec l’occupant. Le premier Code de déontologie prévu par l’ordonnance du 24 septembre 1945 est promulgué le 18 juin 1947.
L’EMERGENCE DE LA BIOETHIQUE
Ce n’est que depuis 1950 que la médecine est devenue réellement efficace. Ces nouveaux pouvoir imposent aux médecins de nouveaux devoirs.
La relation entre soignant et soigné, par delà l’asymétrie des connaissances, doit étre fondée sur l’égalité de deux sujets moraux.
C’est donc le déni du paternalisme médical.
Fondée sur les principes de la morale de Kant, émerge alors une éthique de la responsabilité : « les fins de l’activité morale sont dictées à l’homme par sa propre raison »,
ce qui en fait une morale de l’universalité.
LES PRINCIPES DE LA BIOETHIQUE
principe de bienfaisance : rapport bénéfice / risque du traitement ;
principe d’innocuité : sécurité du patient ;
principe de justice : égalité de traitement ; pour tous les patients .
besoin d’une éthique de l’urgence
LA JUDICIARISATION DE LA MEDECINE
L’évolution du droit des malades qui sont devenus des usagers de la médecine conduit à l’intrusion du judiciaire dans la profession médicale.
Il y a des avantages pour les patients, comme la protection contre l’aléa médical mais aussi de nombreux inconvénients comme le dénoncement des polices d’assurance.
CONCLUSIONS
Quelle que soit l’évolution du droit, le médecin doit se garder de limiter ses devoirs au respect procédural d’une relation contractuelle.
La compassion exige que le médecin se rapproche du malade et l’aide à résoudre ses problèmes de santé.
C’est une médecine participative qu’il faut souhaiter.