En 1949, est créé un enseignement destiné aux paramédicaux, sanctionné par une attestation de fin d’étude. En 1961, le premier programme d’étude en deux ans, d’un bon niveau de connaissances, est qualifié de « monstrueux » par les médecins, un certificat d’aptitude aux fonctions d’aide anesthésiste est délivré. Le ministère inscrit l’anesthésie générale dans les actes professionnels autorisés aux infirmiers. A partir de cette date le train est en marche, les infirmiers anesthésistes entrent dans le corps des infirmiers spécialisés et vont bénéficier d’un statut particulier avec leur propre filière et une représentativité de droit par l’intermédiaire de leur syndicat professionnel créé en 1951 par Anne de Casamajor.
Mais quel est donc la fonction des infirmiers anesthésistes depuis 1961 ?
La photographie professionnelle de 1961 montrerait, dans les hôpitaux généraux, une infirmière anesthésiste seule, faisant tout, le programme, les urgences, ballonnant à la main à tout va, un coup de « biniou », une voie veineuse ! Peu de médicaments et à l’élimination hasardeuse. Un peu plus tard, parfois le bonheur ! du « Fluotane » adieu l’éther ! Un chirurgien qu’il faut suivre sur les chemins de campagne conduisant ventre à terre de l’hôpital à la clinique. L’intubation ? Parfois, car ça retarde tout le monde, il faut extuber .
Des morts ? Pas tant que çà ! Tous les malades chirurgicaux étaient en général en bonne santé. Les autres ? cardiaques, insuffisants rénaux, hypertendus€¦morts depuis longtemps. Les traitements médicaux étaient quasi inexistants.
Dans les CHU, tout neufs (ordonnance de 1958), commençaient à apparaître des machines, des écrans tout petits avec des traits mobiles qui se brouillaient tout le temps, des respirateurs énormes, des médecins anesthésistes, l’infirmière anesthésiste faisait tout, l’anesthésie au gré de l’humeur des uns ou des autres et selon les heures de la journée, la maintenance des appareils, le ménage des placards, essuyant une à une les ampoules sous l’oeil vigilant de la panseuse.
1971 Le programme des études paraît au journal officiel. Plusieurs écoles ouvrent, la formation de la faculté de médecine est arrétée et l’Assistance Publique de Paris ouvre une école en 1973.
1974 : Coup de Trafalgar !
Les médecins anesthésistes réalisent deux choses importantes, l’anesthésie peut rapporter gros en clinique et du pouvoir à l’hôpital public. Alors, on décide de faire entrer les infirmiers anesthésistes dans un cadre en voie d’extinction et de créer des biotechniciens sans formation en soins. Mais la lutte est ouverte ! Le syndicat des infirmiers anesthésistes, les directeurs d’hôpitaux et certains médecins anesthésistes obtiennent le retrait de l’amendement déposé au Parlement.
Le rôle de l’infirmier anesthésiste va se structurer progressivement au sein d’un service d’anesthésie dirigé par un médecin anesthésiste-réanimateur et sous la responsabilité d’un cadre de la spécialité. L’infirmier anesthésiste n’est plus seul, mais membre d’une équipe, il va travailler en complémentarité avec des médecins anesthésistes réanimateurs. Les missions se clarifient, son exclusivité de compétence, obtenue en 1988 le protège. Le programme de 1988, confirmé par celui de 2002, définit clairement les champs d’exercice.
Aujourd’hui, tous les infirmiers anesthésistes sont salariés d’un hôpital, d’une clinique ou d’un groupement médical d’anesthésie. Ses missions sont celles de soignants en anesthésie, la prise en charge du malade par l’infirmier anesthésiste au sein du processus anesthésique. Il assure au patient des soins de haute technicité et une relation humaine privilégiée. Il garant de la sécurité en anesthésie par le suivi du matériel et tous les contrôles qu’il opère,.
L’infirmier anesthésiste compétent n’est plus celui des années soixante qui, comme le bodhisattva Avalokitesvara aux mille mains, faisait tout et partout. Aujourd’hui, sa compétence individuelle est à « restituer au sein de la compétence collective d’une équipe et d’un réseau ».