Club de l'Histoire de l'Anesthésie et de la Réanimation

LE MéDECIN SPéCIALISé EN ANESTHéSIE (1942)

Docteur LAQUERRIERE

Numérisé par : CHAR
  mise en ligne : samedi 7 mai 2022




Il y a toujours des gens qui voient bien les choses, la conclusion de ce papier est remarquable, y compris la réflexion sur les honoraires.

Cordialement
Louis-Jean

LE MéDECIN SPéCIALISé EN ANESTHéSIE

Par le Docteur LAQUERRIERE
Electroradiologiste honoraire des Hôpitaux de Paris.
Professeur à l’Université de Montréal


Anesthésie en 1942

Le premier numéro de 1942 du Concours Médical contient deux articles sur l’anesthésie.

Le premier concerne les dentistes et je ne saurais trop approuver son affirmation que l’anesthésie générale doit étre réservée au médecin : une anesthésie générale, pour étre pratiquée sans danger, comporte comme temps préalable indispensable l’examen du coeur, de la tension artérielle, des poumons ; je ne sache pas que les chirurgiens-dentistes aient été initiés à I’auscultation et cette constatation me parait suffisante, sans qu’il soit besoin d’insister, pour légitimer cette interdiction.

Dans l’autre article Pierre Douriez, sans émettre une opinion formelle. risque timidement : « D’aucuns ne prétendent-ils pas que l’anesthésie devrait étre une véritable spécialité, car elle nécessite des connaissances et une discipline particulières ? ». Si l’auteur paraît disposé à ce qu’on ne permette plus à une simple infirmière de donner l’anesthésie, c’est surtout, semble-t-il, parce que la dichotomie étant désormais interdite, il importe de trouver un moyen de faire participer le médecin traitant aux honoraires chirurgicaux ; mais il ne se prononce pas sur la création de médecins spécialisés en anesthésie.

Il y a là cependant une question très importante au sujet de laquelle je voudrais faire quelques remarques.

Il me semble que l’anesthésie locale doit étre pratiquée ou dirigée par le chirurgien   : seul il se rend compte de ce qui se passe dans le champ opératoire et c’est à lui seul qu’appartient le soin de décider si des injections supplémentaires sont nécessaires.
L’anesthésie générale par contre comporte des risques plus grands et le plus souvent est utilisée pour des opérations plus compliquées ; l’opérateur ne peut la faire lui-méme : il ne peut ni tenir le masque sur le nez du malade ni surveiller comment le patient réagit. Il est donc forcé de recourir à un tiers.

Il y a lieu de se demander qui doit étre chargé de cette besogne ?

Un chirurgien   qui opère toujours avec la méme substance anesthésique, qui a l’habitude d’examiner lui-méme le coeur de son opéré avant de le soumettre à l’action du soporifique et qui garde toute la responsabilité, peut avoir toute confiance dans tel ou tel aide, médecin ou non médecin, qui lui est familier et auquel l’expérience lui a montré qu’il pouvait se fier. Ce méme chirurgien   peut accepter que cet aide soit remplacé éventuellement par un omnipraticien, non spécialement entraîné. Tout médecin, à mon avis, doit savoir utiliser les procédés les plus courants et surveiller le sommeil ; il n’a pas cependant la maestria que confère un exercice journalier. L’opérateur, forcé de lui confier le soin d’endormir, sera peut-étre inquiet la première fois, mais après essais prendra confiance en son confrère ; néanmoins il regrettera peut-étre parfois que cet aide, se livrant seulement de temps à autre à ce travail et par conséquent moins expert remplace la personne à laquelle il se fie tous les jours.

En tout cas, il faut accepter que dans les opérations d’urgence ou dans les petites installations chirurgicales on fasse-comme on peut et qu’on y utilise des anesthésistes non médecins ou médecins non spécialisés. Je pense par contre qu’il y aurait tout intérét à ce qu’il n’en soit pas de méme dans les grands centres.

J’ai vécu en Amérique et j’y ai vu travailler les médecins anesthésistes de carrière, je voudrais les présenter au lecteur français.

Je prendrai comme exemple ceux de l’hôpital Notre-Dame de Montréal, hôpital auquel j’appartenais : alors que la pharmacie, ce qui me paraît une grave erreur, était complètement abandonnée à des religieuses ou à des infirmières n’ayant aucun titre à cet emploi, c’était uniquement à des médecins qu’étaient confiées et recherches biologiques, méme les plus simples (comme la recherche de l’albumine dans les urines) et l’anesthésie des opérés.

L’anesthésie forme un « département » autonome avec un chef de service qui est l’égal du chirurgien   en chef et quatre assistants. Tous ont des appointements convenables pour leurs âges respectifs. Tous doivent passer la matinée entière à l’hôpital ; pour le reste des vingt-quatre heures l’un d’eux est de garde de façon à ce qu’à n’importe quel moment du jour ou de la nuit il soit à la disposition des chirurgiens.

L’emploi de ces spécialisés présente de multiples avantages :

  1. L’opérateur consacre toute son attention à son intervention sans avoir à se préoccuper le moins du monde du degré de la narcose ou de l’état général de celui qu’il opère. En cas d’accident sa responsabilité est entièrement dégagée.
  2. L’anesthésiste est un expert capable d’obvier immédiatement à tout incident et sécurité du malade est pleinement assurée.
  3. Pour les cas où l’on a quelque crainte sur la tolérance pour tel ou tel somnifère, une consultation préalable du chirurgien  , de l’anesthésiste et au besoin du cardiologue, du neurologue ou de tout autre spécialiste, permet de choisir après étude et discussion quel est le procédé à utiliser.
  4. L’anesthésiste est au courant de toutes les méthodes, il peut employer n’importe laquelle d’entre elles, inhalation, injections, lavements qui sont connues. J’ai vu le chef anesthésiste de Notre-Dame aller passer plusieurs jours aux états-Unis pour étudier un procédé nouveau qui lui était signalé ; je l’ai entendu faire des communications qui apprenaient aux confrères les indications, les avantages, les inconvénients de telle substance nouvelle.
  5. Il est ainsi possible de profiter en toute sécurité d’une technique non encore utilisée jusque là et par conséquent de faire bénéficier les malades de tout progrès.
  6. L’instruction des étudiants et des jeunes médecins peut, en ce qui concerne l’anesthésie étre faite par une personnalité tout à fait compétente.

Je m’empresse d’ajouter qu’il existe un petit inconvénient ... mais d’ordre financier : l’anesthésiste réclame sans cesse des perfectionnements de son outillage, car il veut avoir à sa disposition le matériel nécessaire pour tous les systèmes connus. Je fus très impressionné lorsque pour la première fois je pénétrai dans la pièce qui, à l’étage des salles d’opérations, est réservée la resserre du matériel anesthésique. J’y vis de multiples charriots portant des systèmes compliqués d’obus à gaz, de tuyaux, de manomètres, de compteurs de débit, de masques, etc. Seulement il faut reconnaitre que les dépenses pécuniaires que nécessite ce luxe d’appareillage est une des conditions du progrès.

J’estime tout à fait souhaitable, la création d’un corps de médecins anesthésistes. Durant les années que j’ai passées dans la "Nouvelle France" j’ai personnellement, subi trois interventions et j’en ai fait pratiquer plusieurs sur ma femme et ma fille ; je n’ai jamais eu la moindre inquiétude au sujet de l’anesthésie parce que j’étais convaincu qu’elle serait pratiquée par le procédé le plus indiqué, avec le matériel le meilleur, et avec le maximum de compétences.

Mon expérience de ce qui se fait outre Atlantique m’incite donc à préconiser qu’en France tout centre chirurgical important possède un personnel de médecins spécialisés en anesthésie, touchant des honoraires assez importants pour que des individualités de valeur se consacre entièrement à cette spécialité. Cette innovation est propre à libérer les chirurgiens de toute préoccupation étrangère à l’acte opératoire, à assurer la plus grande sécurité possible aux opérés et à permettre le perfectionnement des méthodes.

Articles scientifiques

  • Marx Kappis et quelques autres : Bloc paravertébral et splanchnique.
  • Les commissions du Chloroforme à Hyderabad 1888-1889..
  • Genèse du Samu français : naissance et développement du service de prise en charge de l’urgence.
  • Louis Ombrédanne, le chirurgien et ses contributions à l’anesthésie.
  • Louis Ombrédanne (1871-1856) : L’homme au masque.
  • Robert Picqué (1877-1927), pionnier de l’aviation sanitaire.
  • Histoires et perspectives de l’anesthésie-réanimation en Afrique.
  • Anesthésie générale en dentisterie sans masque
  • Quand, où et par qui ont été effectuées les premières anesthésies dans le monde
  • pour ne pas rater la veine1922
  • Les préconisations antidouleurs ou anesthésiques dans l’histoire de la médecine égyptienne.
  • Vassily von Anrep (1852-1927) : pionnier de l’usage de la cocaïne en anesthésie locorégionale.
  • Charles James Campbell, accoucheur parisien, ardent défenseur de l’anesthésie obstétricale en France.
  • Par le feu ou par le fer (Histoire des chirugiens français)
  • De L’inconnue de la Seine à Resusci Anne
  • Neuroleptanalgésie
  • La plus vieille pathologie du monde, la Kéraunopathologie (pathologies dues à la foudre)
  • Anesthesias Administered in the Hospitals of the State of New Jersey : A Survey. (1930)
  • LE MéDECIN SPéCIALISé EN ANESTHéSIE (1942)
  • Fracture of the neck of the femur treated with a Smith Petersen nail
  • Place des ’préservatifs’ dans les épidémies
  • Apport de la deuxième guerre mondiale pour la transfusion sanguine
  • John Snow (1813-1858) premier médecin anesthésiste mondial.
  • Latta aux prémices de la réanimation
  • Les débuts de l’anesthésie au Québec (1608-1955)
  • Indications étonnantes de l’utilisation du chloroforme
  • Peter Safar - Histoire de la Réanimation Cardio Pulmonaire (RCP)
  • L’anesthésie anglaise dans une thèse française
  • Histoire de l’oxygéno thérapie inhalatoire jusqu’en 1940
  • Frolics Parties, histoire de l’usage récréatif du protoxyde d’azote
  • COVID 19 : la CPAP BOUSSIGNAC ® à l’honneur
  • Evolution des IADE 1945-2018
  • 20 ans de livres anciens d’anesthésie
  • Discussion session Sfar/Char du 20 septembre 2019
  • Les 20 ans du Club de l’histoire de l’anesthésie et de la réanimation
  • L’avenir de l’anesthésie française
  • Les progrès de la sécurité en anesthésie
  • Evolution des techniques de l’anesthésie générale de 1960 à nos jours.
  • Anesthésie Vétérinaire
  • Amygdales
  • Réanimation des noyés. Les clystères à fumée de tabac.
  • Histoire de la découverte de la circulation sanguine
  • La syncope de Champollion
  • Histoire des congrès de la SFAR
  • Paul Janssen et le R875
  • Un Samu à la montagne
  • Charles-Gabriel Pravaz (1781-1853), inventeur de la seringue ?
  • De Toulouse à Rennes
  • People et anesthésie
  • Le stéthoscope de Laennec
  • Appareil Narko - H. Braun
  • Profession : anesthésiste
  • Expériences de mort imminente
  • Origine des transplantations d’organes : la greffe rénale.
  • Lavoisier et Laplace : leurs héritages pour l’anesthésiologie
  • Histoire de l’hôpital cardiologique de Bordeaux
  • L’anesthésie locale par réfrigération
  • Le syndrome post-traumatique
  • Le service de réanimation de l’hôpital Claude Bernard en 1960
  • 1906 : une commission pour honorer Horace WELLS
  • Le cyclopropane : une aventure explosive et bénéfique ?
  • Le rôle déterminant des médecins dans la création de la médecine aéronautique pendant la grande guerre
  • La recherche fondamentale en anesthésie.
  • L’anesthésie-réanimation-transfusion pendant la première guerre mondiale
  • Histoire de la curarisation
  • Ils se sont opérés eux-mémes sous anesthésie régionale.
  • 60 années d’anesthésie en Belgique
  • Le SMUR : à l’Est également ...
  • Chemical warfare agents
  • Les armes chimiques
  • La contribution de Victor Pauchet à l’anesthésie locorégionale : Pauchet, Sourdat, Labat et les autres
  • F.A. MESMER : le dernier magicien du 18° siècle
  • Philip Raikes Bromage : 1920 - 2013
  • Livret des résumés des communications de la 29éme réunion scientifique du Char
  • L’anesthésie réanimation française en 1950 et en 1958
  • Médecine monastique
  • le R.P.R
  • Enfantement du paléolithique à nos jours
  • Hypnotisme et le Dr Knowles
  • Raimu dernière victime du chloroforme ?
  • Ces auteurs qui n’ont jamais existé : Student, N. Bourbaki et la figure emblématique de la référence erronée, O. Uplavici
  • Des effets physiologiques et therapeutiques des ethers
  • Les pionniers de la médecine routière
  • Les grandes épidémies
  • L’analgésie hypnotique à travers l’histoire médicale
  • La vie de Joseph Thomas Clover (1825-1882)
  • Appareils et méthodes d’anesthésie de J T Clover (1825-1882)
  • Les méthodes asiatiques ancestrales de réanimation sont elles efficaces ?
  • Pratique de l’anesthésie réanimation au cours de la bataille de Dien-Bien-Phu
  • Traité de la Saignée
  • Méthodes non médicamenteuses d’analgésie et d’anesthésie citées dans le Corpus d’Hippocrate
  • La Société Française d’Anesthésiologie d’hier à aujourd’hui
  • Histoire de l’anesthésie pédiatrique à Paris
  • Evolution de la réanimation au cours des conflits armés
  • Evolution du Transport sanitaire d’urgence au cours des conflits armés
  • Alcool et médications dans l’antiquité
  • Découverte de l’antisepsie et de l’asepsie chirurgicale
  • Evolution de l’anesthésie au cours des conflits armés
  • Gamma OH : naissance, intérét, déclin (?).
  • Les dangers de l’anesthésie par éther et chloroforme
  • Histoire de l’hyperthermie maligne de l’anesthésie
  • Histoire de l’autotransfusion
  • Histoire des Infirmiers anesthésistes
  • Hôtel-Dieu de Poitiers - Protocoles d’Anesthésie - 1936 - 1940
  • Histoire des injections intra-veineuses
  • La Peste à Lyon en 1628/1629
  • Réanimation pédiatrique
  • Méthodes d’analgésie décrites par Pline l’Ancien
  • L’oxygène
  • Histoire des premières recommandations de la Société Française d’Anesthésie et de Réanimation
  • Raphael Dubois et sa machine à anesthésier
  • Sicard Cathelin et l’Anesthésie Péridurale
  • Une aventure éditoriale singulière : Agressologie
  • Voies ectopiques d’admission de différents agents d’anesthésie
  • D’Hippocrate à Maimonide, l’humanisme médical et la déontologie
  • Contribution de Claude Bernard à l’Anesthésie
  • Poids et mesures qui sont d’usage en médecine
  • Liberté des voies aériennes supérieures (1ère partie)
  • Naissance de l’anesthésie à Bordeaux
  • à propos de 80 anesthésies par inhalation d’éther
  • La noyade (extrait de La médecine des accidents)
  • Mort apparente due au chloroforme et choc électrique
  • Cyprien Oré : Découverte de l’anesthésie intraveineuse
  • L’Anesthésie rachidienne a cent ans
  • nouveau LAROUSSE MEDICAL illustré
  • Moyen pour éviter la confusion des médicaments
  • Première mesure de la pression veineuse périphérique par voie sanglante
  • Une année d’anesthésie lombaire à la novocaïne en 1910
  • Anesthésie pédiatrique - Chirugie Infantile
  • Aspects actuels de l’anesthésiologie .
  • Premier congrès national d’anesthésie (Livret)
  • Deuxième congrès national d’anesthésie (Livret)
  • Troisième congrés national d’anesthésie (Livret)
  • Aperçus sur le développement de l’anesthésie chirurgicale à l’Assitance publique de Paris (1846-1965)
  • Les Aphorismes d’Hippocrate
  • Le choix de l’anesthésie au cours de la première guerre mondiale
  • Seishu Hanaoka (1760 - 1835)
  • Vie et mort d’Horace Wells
  • Arrivée de l’Ether en France, de Boston à la communication de Malgaigne..
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  • L’histoire du mot curare : du mythe (Raleigh) à la réalité (Gumilla et La Condamine)
  • Le Pulmoventilateur du Pr. Charles Hederer.
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  • Henri Laborit - un littéraire rebelle converti à la science.
  • Histoire et évolution de l’anesthésie pédiatrique
  • L’Hémospasie : Une technique d’anesthésie générale insolite


  • Articles connexes

    Histoire de l’anesthésie

    Traité d’anesthésie chirurgicale

    Traité de l’anesthésie générale et locale

    Petit manuel d’anesthésie chirurgicale

    Discussion session Sfar/Char du 20 septembre 2019