Club de l'Histoire de l'Anesthésie et de la Réanimation

Les musées sont à vendre !!!!

editorial avril 2010

Chavagnac Bruno

date de publication : 21 avril 2010


  mise en ligne : mercredi 21 avril 2010




Le musée de médecine de l’Hôtel-Dieu de Lyon aux soins palliatifs

L’Expert
Numéro entièrement consacré à l’Hotel-Dieu
Avec l’aimable autorisation des auteurs

Non pas leurs collections qui sont des biens inaliénables, mais leurs murs ce qui revient à peu près au méme : les trésors cachés font réver les petits enfants mais n’apportent rien aux générations actuelles et futures.

Quand, en plus, ils sont à la charge d’une administration hospitalière leur maintien, sous perfusion et oxygène, relève d’une époque bien antérieure au budget global.

Alors, restructurations et projet d’établissement obligent, le deuxième CHU de France se sépare de son Hôtel-Dieu « libéré » ( ?) de toute activité médicale à l’automne de cette année. Que les hôpitaux, petits et grands, quittent les vénérables bâtiments où ils ont grandi est synonyme de progrès et de meilleur usage des deniers de l’assurance maladie. Ces vieux bâtiments sont donc, au mieux loués, au pire vendus au plus offrant avec d’avantageuses défiscalisations dans le cadre des sites protégés (loi Malraux).

Il est pourtant des reconversions exemplaires comme celle de l’Hôtel-Dieu Saint Jacques de Toulouse (XIIe siècle) : installation de la Direction Générale et du siège administratif du CHU (1981), Institut Européen de Télémédecine, Centre Européen de recherche sur la peau, espaces d’exposition et méme : accueil hivernal de « sans abri ».

A Lyon, l’élaboration du programme de reconversion (SERL) de l’Hôtel-Dieu comprend un hôtel 5 étoiles de 150 chambres pour un tiers de la surface, des commerces de luxe pour le deuxième tiers et des activités tertiaires pour le dernier tiers (banques, assurances, juridique€¦). Exit le musée (musée de France), ses 15.000 objets répertoriés, ses 10.000 visiteurs par an, ses deux salles reconstituées de l’ancien hôpital de la Charité (rasé en 1934).

Un homme, René Mornex, a dit non. Ecarté du comité de pilotage qui a statué sur le sort de l’Hôtel-Dieu, cet ancien professeur d’endocrinologie, ancien doyen   de la faculté et membre de l’Académie de Médecine, vice-président du Conseil d’Administration des Hospices Civils de Lyon, construit avec obstination, constance et détermination, depuis 2008, le projet d’un grand musée de la santé réunissant les quatre musées lyonnais dédiés à l’histoire de la médecine, de la pharmacie et de l’odontologie. Ces quatre musées (dont deux sont déjà menacés de disparition) réuniraient leurs richesses et leur savoir-faire au sein de l’Hôtel-Dieu, sur 4.000 m2, entourés d’espaces pédagogiques, d’ateliers et de salles de documentation, voire d’un centre de séminaires.

La réunion de ces quatre entités muséales se ferait dans le cadre d’un Etablissement Public de Coopération Culturelle.

Le musée de l’Hôtel-Dieu de Lyon est donc actuellement en survie artificielle. Bientôt isolé dans un immense bâtiment de 35.000 m2, puis fermé en raison des travaux de réhabilitation et de reconversion du site, ce musée ne devra sa survie, voire sa « renaissance » qu’à la création d’un grand musée de la santé, comme le préconise René Mornex.

Le patrimoine médical et humaniste lyonnais ne veut pas s’éteindre en silence sous les yeux d’une administration hospitalière assommée de déficits et d’une municipalité amblyope.

Comme le disait le philosophe F. Hegel :
« Rien de grand ne s’est jamais réalisé sans passion. »